Nombreux sont les auteurs qui vous le confirmeront : la publication d’un livre est une aventure enrichissante et enthousiasmante. Réalisation d’un rêve de toujours pour certains, aboutissement d’un patient travail de recherches pour d’autres, passer d’un manuscrit à un livre imprimé est un accomplissement notoire pour quiconque aime écrire et transmettre. Peu d’entre eux pourtant font l’exercice de rédiger un plan d’affaires d’auteur(e) au début de leur projet.

Louise, pourriez-vous vous présenter ?
J’ai publié trois livres: Géants, Bogue céleste et Miniatures… Le premier en 2015. J’ai toujours voulu écrire, fascinée que j’étais par la force d’évocation des mots. La carrière d’écrivain me semblant incertaine, j’ai opté pour un métier stable, celui de comptable. Mais je n’ai jamais cessé d’écrire et aujourd’hui je consacre une part importante de mon temps à l’écriture.
Pouvez-vous nous dire pourquoi il est important que les auteurs fassent un plan d’affaires ?
Tout simplement pour comprendre où ils vont, pour élargir leur réflexion aussi et pour valider que leur projet est viable. Vous comprenez, quand vous écrivez, vous êtes toujours persuadé que votre livre est le meilleur. Vous l’idéalisez. Et c’est normal. Alors, à un moment, il faut confronter votre rêve à la réalité. Ça vous évitera des désillusions.
Combien de temps cela vous prend, en général, de faire un plan d’affaires d’auteur ?
Assez longtemps, en fait. Je vais vous expliquer. Vous ne pouvez pas vous mettre à votre table de travail un matin en vous disant: ce soir, mon plan d’affaires sera terminé. En fait, dès que je commence à écrire, je construis un plan de travail. C’est-à-dire que je prends des notes sur un agenda papier. Je note toutes les idées qui me passent par la tête. Je les relis souvent et je fais le bilan sur la direction que mon écriture prend. J’estime aussi le nombre d’heures que je vais consacrer à l’écriture.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’unqui voudrait faire son plan d’affaires d’auteur ?
De parler avec des gens qui ont une expérience à partager: des auteurs, des réviseurs, des graphistes, des éditeurs. Vous aurez une meilleure idée des écueils qui vous attendront. Car il y en aura. C’est important de faire la différence entre ce qui est essentiel et ce qui est secondaire. Un auteur qui débute a plein de préjugés et de rêves. Il faut qu’il les mette à l’épreuve. Nous ne sommes pas tous outillés de la même façon pour faire face à la réalité. C’est souvent au contact des autres qu’on apprend le plus.
Vous avez eu deux expériences différentes de l’autoédition : l’une avec un éditeur qui vous avait proposé de vous accompagner dans votre projet moyennant finance, l’autre avec BouquinBec. Pouvez-vous les comparer ?
Bien entendu. Lorsque j’ai travaillé avec cet éditeur, je ne me suis occupée que d’écrire. Pour le reste, je ne contrôlais absolument rien. Avec BouquinBec, c’est moi qui suis en contrôle de mon projet. Et je préfère cela car j’ai la main sur tous les détails. À la fin, le livre correspond exactement à ce que je voulais. Même s’il y a des ajustements à faire, c’est toujours moi qui décide. J’ai également compris que je devais faire attention à tout ce que je disais à mes collaborateurs, sinon ils partaient dans de mauvaises directions.

Quel est votre avis sur l’autoédition ?
J’aime être en contrôle de mes projets, donc je préfère l’autoédition. Mais je rêve de rejoindre le grand public pour deux nouveaux projets qui me tiennent à cœur. Alors je tenterai probablement l’aventure avec un éditeur. La promotion en autoédition est un sacré défi. Certains livres sont faits pour un public plus limité et là, l’autoédition est selon moi la meilleure solution. Ce que j’aime particulièrement avec BouquinBec, c’est que mes livres sont encore disponibles plusieurs années après leur publication.
En général, comment vous y prenez-vous pour financer vos projets de publication ?
J’autofinance tout, mais, là aussi, je suis méthodique. Je prévois les fonds à l’avance. Quand je décide de me lancer, j’ouvre un compte en banque spécifique et toutes les semaines j’y verse un montant qui me sera utile dès que je commencerai à avoir des dépenses. Il faut anticiper. C’est ça le secret.Pourriez-vous nous confier les principales erreurs que vous pensez avoir commises dans vos projets d’autoédition ?
Il faut travailler avec une équipe en qui on a confiance. Et ça prend du temps pour la réunir. Des fois, on la trouve au bout de plusieurs livres. Comme j’ai choisi au départ de recruter moi-même mon propre réviseur et mon propre graphiste, j’ai connu des déceptions. Par exemple, j’ai dû faire réviser deux fois mon premier manuscrit. Et puis un jour, pendant un salon du livre, j’ai rencontré Catherine sur le kiosque de BouquinBec. Nous avons été prendre un café ensemble et j’ai tout de suite senti que ça cliquait bien entre nous. Quelques mois plus tard, nous travaillions ensemble sur mon nouveau livre.
Quels sont les principaux risques pour un auteur ?
Ce sont avant tout des risques financiers. Mon premier conseil serait de vous dire de ne pas imprimer trop de livres. Si vous débutez, que vous n’êtes pas connu, que votre promotion est modeste, commencez par imprimer une centaine de livres. Si ça décolle, ce sera facile et rapide d’en réimprimer. Mais je crois que le meilleur conseil que je pourrais donner aux auteurs, ce serait d’intégrer la possibilité d’un échec. Ça arrive souvent qu’on obtienne des résultats inférieurs à ses attentes. La concurrence est tellement rude dans l’édition. Il ne faut pas se laisser démolir par l’insuccès.
Nelson Mandela disait: « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends. » Un jour, j’ai présenté un de mes projets à un éditeur, qui l’a franchement critiqué. En sortant de mon rendez-vous, j’ai dit merci pour ce cadeau car je me sentais assez solide pour accepter d’être remise en question.
Pouvez-vous nous parler de vos projets actuels ?
Il y en a deux. Le premier est le récit de la vie du premier alpiniste québécois qui a gravi deux fois l’Everest. C’est un projet qui représente des centaines d’heures d’entretiens et d’écriture. Le livre est terminé. Je cherche un éditeur car c’est un livre qui est fait pour le grand public.Le deuxième est un projet personnel pour lequel je ne sais pas encore exactement si je le ferai en autoédition ou si je chercherai un éditeur. C’est l’histoire de ma grand-tante. Née en 1903, elle est devenue infirmière et s’est engagée en 1941 dans l’armée. Elle est partie en Angleterre. À la fin de la guerre, elle a été transférée sur le front italien. Le bateau sur lequel elle était a été torpillé. Mais elle s’en est sortie. Après la guerre, revenue à Montréal, elle a travaillé au service des maladies vénériennes. J’ai reconstitué sa vie en faisant des recherches dans toutes sortes d’archives. C’est un véritable travail d’historienne. La mémoire est partout. Cette expérience est tellement extraordinaire que je pense même en tirer un second livre car ce que j’ai découvert m’a beaucoup appris sur ma famille, sur ma mère, sur qui j’étais, et j’ai envie de partager tout ça.
Merci Louise !
Anticiper, c’est la condition première pour réussir
En créant avec Louise Tremblay le Guide de la planification financière de l’auteur, BouquinBec donne encore une fois la preuve que son objectif est de redonner aux auteurs la première place dans le monde de l’édition.
Quand un auteur choisit l’autoédition, c’est en général parce qu’il souhaite rester en contrôle de tous les paramètres de la publication : droits d’auteur, révision, mise en page, création de la couverture, date de publication, promotion, vente en ligne, etc.
Votre plan d’affaires d’auteur, c’est le document qui rassemblera tous les éléments clés de votre projet: vous y décrirez en détail vos objectifs de vente, vous mettrez votre stratégie marketing en chiffres et vous expliquerez quels moyens vous vous donnez pour réussir. Vous y enregistrerez bien sûr toutes vos dépenses. Et, plus important encore, vous fixerez un calendrier afin de vous rapprocher le plus possible de la réalité.

Au fur et à mesure que vous construirez ce plan, votre vision se précisera et vos enjeux se clarifieront. Vous mettrez le doigt sur les points que vous devez encore travailler pour rendre objectifs tous les éléments: coûts de développement de votre image de marque (publicité), tâches à réaliser (publication d’une infolettre), indicateurs de performance (nombre d’abonnés à votre infolettre, etc). Votre ennemi s’appelle le manque d’anticipation. Ne comptez pas sur la chance ! Laissez le moins de place possible aux aléas.
Pour conclure, un plan d’affaires ce n’est pas un supplice. C’est au contraire un exercice passionnant qui vous permettra de mettre en relief tous les sujets essentiels. Lorsque vous verrez vos prévisions se réaliser, vous obtiendrez la plus belle des récompenses, car vous ne devrez votre réussite qu’à vos efforts. Vous vous sentirez alors comme un auteur à part entière, indépendant et fier de l’être.